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Page:Lindau - Un voyage autour du Japon.djvu/22

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un temps considérable. Debout, pesant de tout le corps sur leurs longues et lourdes rames, dont le maniement exige des membres vigoureux et exercés, ils travaillent sous un ardent soleil, durant des heures entières, sans relâche et en apparence sans lassitude. Souvent ils accompagnent leur travail d’un chant monotone, au rhythme bien cadencé ; plus souvent encore, semblables aux portefaix chinois, ils poussent, à de courts intervalles, des cris aigus qu’ils soutiennent pendant quelques secondes, et qui ont pour principal effet de dégager les poumons.

Mes pêcheurs ramaient bravement, et toutefois nous n’avancions guère. La marée contrariait nos efforts et, vers le coucher du soleil, trois heures après mon départ, je me trouvais encore bien loin de la terre. Je me repentis presque de m’être remis entre les mains d’hommes que je ne connaissais point ; mais les regrets étaient chose superflue à ce moment, et il ne restait qu’à rendre la situation aussi agréable que possible. Je plaçai donc un rouleau de nattes sous ma tête, et, bercé par la mer, je m’endormis au chant des matelots. Lorsque je me réveillai, il était nuit. À l’avant du bateau, on avait allumé une grande lanterne en papier. À la douteuse lueur qu’elle répandait, j’aperçus les six hommes d’équipage poussant leurs avirons avec la même activité qu’au départ. Autour de moi, je distinguai