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Page:Lintilhac - Lesage, 1893.djvu/208

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SA POSTÉRITÉ LITTÉRAIRE.

jamais », disait Giraud un peu trop tôt et visant trop haut. Mais viendra le vieux Teissier des Corbeaux qui, plus sage, se contentera de la jeunesse de Marie, et l’épousera, aidé de maître Bourdon, son Raffe. Voilà le vieux coquin, cette dernière incarnation de Turcaret, qui se croit alors blasonné d’honnêteté, et déclare avec l’impudence de son ancêtre, quand il allait donner à la tête de sa compagnie l’exclusion à des pieds-plats : « Vous êtes entourée de fripons, mon enfant, depuis la mort de votre père ». Le fils de Teissier et de Marie jouira d’une certaine considération, et, plus heureux que Giraud, il pourra mener à l’autel, la tête haute, Elisa de Roncourt, à moins que de la Brive, qui commençait à se dire socialiste, communiste même, dès Mercadet, ne vienne le barrer. C’est bien possible : ne l’entendons-nous pas crier sus à Turcaret, tous les jours, et faire de ce nom sa plus cruelle injure, tant il sonne haut encore, après deux siècles et sept ou huit révolutions ! Faisons des vœux cependant pour que le fils de Giboyer réalise le rêve de son père, qui était aussi celui de Lesage, en face des insolences de Turcaret, et suscite la seule « aristocratie du mérite ».

On voit en tout cas que la postérité de Turcaret n’est pas près de s’éteindre. Mais ce n’est pas seulement par son personnage principal que le chef-d’œuvre dramatique de Lesage a influé sur notre comédie de mœurs. Elle y trouve l’exemple d’une autre de ses plus grandes hardiesses. À côté de la tyrannie de l’argent, on y voit poindre la puissance de la