Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/130

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
129
THUCYDIDE, LIV. I.

nique que du généralat. Il fut rappelé précisément à l’époque où, à raison de la haine qu’il inspirait, les Hellènes, excepté les guerriers du Péloponnèse, se rangeaient sous les ordres des Athéniens. Arrivé à Lacédémone, et convaincu d’abus de pouvoir contre des particuliers, il fut absous des accusations capitales. On lui reprochait surtout d’imiter les manières des Mèdes, accusation qui semblait très fondée. Aussi le commandement ne lui fut-il pas rendu : mais on fit partir Dorcis et quelques autres avec peu de troupes. Les alliés refusant de leur obéir, ils revinrent, et les Lacédémoniens n’envoyèrent plus dans la suite d’autres généraux. Après ce qu’ils avaient vu de Pausanias, ils craignaient qu’ils ne se corrompissent. D’ailleurs ils voulaient se délivrer de la guerre des Mèdes ; ils croyaient les Athéniens capables de la conduire, et alors ils étaient amis.

Chap. 96. Les Athéniens ayant pris ainsi le commandement suivant le désir des alliés, par suite de la haine qu’on portait à Pausanias, décidèrent quelles villes donneraient de l’argent pour faire la guerre aux Barbares, et lesquelles fourniraient des vaisseaux. Le prétexte était de ruiner le pays du grand roi, par représailles de ce qu’on avait souffert. Alors s’établit chez les Athéniens la magistrature des hellénotames, qui recevaient le tribut, fixé d’abord à quatre cent soixante talens. Le trésor fut déposé à Délos, et les assemblées se tinrent dans l’hiéron.

Chap. 97. Commandant à des alliés qui, autonomes dans le principe, délibéraient dans des assemblées communes, ils parvinrent, dans l’intervalle qui s’écoula entre cette guerre et celle des Mèdes, à une bien grande puissance. Ils le durent à un heureux concours de circonstances et d’affaires, et à des combats livrés, soit à des alliés remuans, soit aux Péloponnésiens, qui s’immisçaient dans les querelles. J’ai écrit ces événemens, et me suis permis cette digression, parce qu’elle donne une partie de l’histoire négligée par ceux qui, avant nous, ont traité ou l’histoire hellénique antérieurement à la guerre des Mèdes, ou la guerre médique elle-même. Quant à Hellanicus, qui, dans son Histoire de l’Attique, a en vue les mêmes faits, il les donne trop en abrégé et sans s’assujettir à l’ordre des temps. D’ailleurs cette digression a encore l’avantage de montrer l’origine de la prééminence athénienne.

Chap. 98. D’abord, sous le commandement de Cimon, fils de Miltiade, Athènes prit d’assaut Éione sur le Strymon, place occupée par les Mèdes, et en asservit les habitans. Elle soumit ensuite ceux de Scyros, île de la mer Égée, appartenant aux Dolopes, et y envoya une colonie. Elle fit aussi aux Caristiens une guerre à laquelle le reste de l’Eubée ne prit aucune part, et qui enfin se termina par un accord. Suivit une autre guerre contre les habitans de Naxos, qui s’étaient détachés de la république : ils furent assiégés et subjugués. C’est la première ville alliée qui, au mépris du droit public, ait été réduite à la condition de sujette : d’autres successivement subirent le même sort.

Chap. 99. Les défections des alliés eurent différentes causes. Les principales furent l’impossibilité de fournir des contributions d’argent et de vaisseaux ; et pour quelques-uns, le refus de service militaire : car les Athéniens exigeaient ces tributs à la rigueur, et faisaient des mécontens, contraignant aux fatigues militaires des gens qui n’avaient ni l’habitude, ni la volonté de les supporter. D’ailleurs, ils ne cherchaient plus comme auparavant, à se faire aimer dans l’exer-

9