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ARRIEN, LIV. I.

lance à la députation, écrit au peuple d’Athènes qu’il ait à lui livrer Démosthène, Lycurgue, Hypéride, Polyeucte, Charès, Charidème, Éphialtès, Diotime et Méroclès : il les regardait comme les auteurs de la journée sanglante de Chéronée, et de toutes les entreprises tentées contre Philippe et contre lui-même ; il ne les accusait pas moins que les principaux chefs et les instigateurs mêmes de la défection des Thébains. Les Athéniens, au lieu de les livrer, députent de nouveau vers lui pour apaiser son courroux, et le supplier d’épargner leurs concitoyens. Il accueille leur demande, soit par égard pour la ville d’Athènes, soit qu’à la veille de passer en Asie, il ne voulût laisser dans la Grèce aucun sujet de mécontentement, il se borna seulement à exiger le bannissement de Charidème, qui se réfugia en Asie près de Darius.

Chap. 3. Cette expédition terminée, Alexandre retourne en Macédoine, présente à Jupiter Olympien le sacrifice institué par Archélaüs, et ordonne la pompe des spectacles olympiques à Égée : on ajoute qu’il fit célébrer des jeux en l’honneur des Muses.

On répandit alors le bruit que la statue d’Orphée Œagrien était sans cesse couverte de sueur. Les devins se partagèrent sur l’explication de ce prodige ; mais le plus habile d’entre eux, Aristandre de Telmisse, s’écria : Courage Alexandre ! tes exploits feront suer les poètes.

Au commencement du printemps, Alexandre laisse le gouvernement de la Macédoine et de la Grèce à Antipater, et se dirige vers l’Hellespont. Son armée était composée de trente mille hommes, tant de pied que de traits et soldats armés à la légère, et de plus de cinq mille hommes de cavalerie. Il tire le long du lac de Cercine, vers Amphipolis et l’embouchure du Strymon ; le traverse ; franchit le mont Pangée par la route qui conduit à Abdère et à Maronée, villes grecques de la côte maritime.

Ayant sans peine passé l’Hèbre, il arrive par la Pœtique aux bords du Mélas, le traverse et touche à Sestos le vingtième jour après avoir quitté la Macédoine. Il part pour Éléonte, et sacrifie sur le tombeau de Protésilas qui, parmi les Grecs, à la suite d’Agamemnon, aborda le premier en Asie. Le prince espérait par ce sacrifice obtenir un sort plus heureux que Protésilas. Il charge Parménion du soin de faire passer le détroit d’Abydos à la plus grande partie de l’infanterie et à la cavalerie : leur passage s’effectue sur cent soixante trirèmes et autres bâtimens de transport.

Selon plusieurs écrivains, Alexandre passa d’Éléonte au port des Achéens, gouvernant lui-même le vaisseau royal qu’il montait. Au milieu de la traversée de l’Hellespont, il immola un taureau ; et, prenant une coupe d’or, fit des libations à Neptune et aux Néréïdes.

Chap. 4. On dit qu’Alexandre le premier prit terre, tout armé, en Asie, et qu’à son départ et à son arrivée, il avait dressé des autels à Jupiter Apobaterios, à Minerve et à Hercule, sur les bords de l’Europe et de l’Asie. À Troie, il sacrifie à Pallas, protectrice d’Ilium, suspend ses armes dans le temple, et enlève celles qu’on y avait consacrées après la guerre de Troie ; il ordonna aux hoplites de les porter devant lui dans tous les combats. On dit qu’il sacrifia aussi sur l’autel de Jupiter Hercius ; à Priam, pour en apaiser le ressentiment contre la race de Néoptolème à laquelle il appartenait. À son entrée dans Ilion, Menœtius, qui dirigeait la manœuvre du vaisseau, posa sur le front du roi une couronne d’or. Charès, arrivé