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POLYBE, LIV. XXXVII.

la fois les Macédoniens et les Romains, et qui cependant n’est point pourvu de ressources raisonnables pour exécuter ses desseins ; car on savait assez que le vrai Philippe, âgé de dix-huit ans, était mort à Albe, en Italie, deux ans après Persée lui-même ; et lorsque, trois ou quatre mois plus tard, le bruit s’était répandu qu’il avait battu les Macédoniens dans un combat livré sur les bords du Strymon, dans l’Odomantique, province de Thrace, les uns accueillirent cette nouvelle avec confiance ; mais le plus grand nombre n’y crut point. Quand, peu après, on répéta qu’il avait vaincu les Macédoniens et qu’il était maître non-seulement du peuple qui avoisine le Strymon, mais encore de toute la Macédoine ; quand enfin les Thessaloniens eurent envoyé des lettres et des députés aux Achéens, pour demander des secours contre les dangers qui les menaçaient, cet événement parut un prodige ; car on ne trouvait ni vraisemblance, ni vérité dans ces bruits. Voilà quelles étaient les dispositions des esprits à cet égard. (Angelo Mai, etc.)


VII.


Manilius ayant fait passer aux Achéens, dans le Péloponnèse, des lettres par lesquelles il leur demandait d’envoyer Polybe le Mégalopolitain à Lilybée, parce qu’il serait utile aux affaires publiques, les Achéens jugèrent convenable d’obtempérer aux avis du consul. Nous crûmes qu’il était du devoir des Achéens d’obéir aux Romains, et, mettant toute affaire de côté, nous nous embarquâmes au commencement de la belle saison. Arrivés à Corcyre, nous y prîmes connaissance de nouvelles lettres des consuls, par lesquelles ils faisaient savoir que déjà les Carthaginois avaient remis des ôtages, et qu’ils étaient disposés à subir les conditions de Rome. Supposant alors que la guerre était terminée, et que nos services devenaient inutiles, nous reprîmes le chemin du Péloponnèse. (Ibid.)


Il ne faut point s’étonner si parfois je me place en nom dans mes écrits, d’une manière générale, comme celle-ci : « Après que j’eus dit cela ; » ou bien : « Quand nous eûmes pris cette décision ; » car ayant été souvent mêlé aux faits que j’ai à raconter, il est bon que je varie mes expressions pour ne point fatiguer mes lecteurs par des redites, et en leur parlant toujours de moi. Au moyen de ces locutions et de changemens convenables dans la tournure des phrases, j’évite autant que possible de faire revenir mon nom ; car bien que cette manière de s’exprimer soit naturellement désagréable, elle devient souvent nécessaire, quand les faits l’exigent. Du reste, j’ai dans cette circonstance une sorte d’avantage, puisque jusqu’à présent personne que je sache n’a porté le même nom que moi. (Ibid.)


IX.


Les statues de Callicrate ayant été renversées pendant la nuit, et au contraire celles de Lycortas rétablies au grand jour dans leur ancienne place, cet événement faisait dire qu’il ne faut point s’enorgueillir dans les momens de prospérité, et que l’on doit songer que le rôle de la fortune est de renverser tous les ambitieux par leurs propres actes et par leurs projets ; car les hommes aiment naturellement les nouveautés et sont portés pour tous les changemens. (Ibid.)