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par toute la troupe nervienne ; elles furent accablées, et perdirent la plupart de leurs officiers.

Lorsque le proconsul passa de son aile droite à son aile gauche, il la trouva dans le plus grand danger. Les enseignes de la 12e légion avaient été réunies dans un même endroit, et les soldats entassés à l’entour, se gênaient l’un l’autre pour combattre. César jugea bien vite que le découragement commençait à gagner ses troupes, et que tout était perdu sans un vigoureux effort.

Il arrache le bouclier d’un soldat du dernier rang, parvient jusqu’au front de bataille, appelle ses centurions par leur nom, encourage les légionnaires, ordonne de porter les enseignes en avant, et fait ouvrir les rangs et les files, afin que chacun puisse se servir de l’épée. Sa présence suffit un moment pour tenir l’ennemi en respect.

Quand il vit que l’impétuosité nervienne était ralentie, il fit passer l’ordre aux centurions de rapprocher peu à peu les deux légions en péril, et de les adosser l’une à l’autre. Cette manœuvre qui les couvrait réciproquement les délivra de l’inquiétude d’être prises à dos.

Déjà on apercevait les deux légions de l’arrière-garde ; elles accouraient au secours de César, lorsque Labienus, qui avec l’aile gauche romaine avait repoussé les Atrebates par delà les rives de la Sambre, et s’était emparé des bagages, vit du haut de la colline ce qui se passait vers le camp romain. Aussitôt il détache la 11e légion qui accourt en toute diligence.

L’arrivée de ces troupes changea de suite les faces du combat. Les vaincus prirent l’offensive, et ce fut aux vainqueurs de se défendre. La confusion, dont les Nerves avaient si bien profité au commencement de la bataille, les atteignit à leur tour ; ces troupes furent assaillies et enveloppées. Les cavaliers de César, voulant effacer la honte de leur fuite, se portaient partout où ils pouvaient devancer les légions ; les valets eux-mêmes ramassèrent des armes et combattirent avec courage.

De quatre cents chefs qui commandaient les troupes nerviennes, il n’en resta que trois, et de soixante mille hommes dont elles étaient composées, cinq cents seulement sortirent du champ de bataille. Des vieillards, des femmes et des enfans, seuls débris de cette nation belliqueuse, députèrent près de César du fond de leurs marais, afin d’implorer sa clémence ; on ignore comment ils furent traités.

Un autre ennemi tenait encore la campagne, les Aduatikes, ces descendans des Cimbres et des Teutons, dont la présence avait jadis répandu la terreur dans la Gaule, l’Espagne, l’Italie, et qui étaient établis au-dessus du confluent de la Sambre et de la Meuse.

Ils s’avançaient pour secourir la nation nervienne, lorsqu’on leur annonça l’issue de la bataille. Les Aduatikes songèrent alors à retourner dans leur pays où, abandonnant leurs habitations ordinaires, ils se réfugièrent dans une retraite si bien couverte par des rochers, qu’on la regardait comme inaccessible.

Ce lieu, propre à les garantir des incursions des barbares de leur voisinage, était un faible asyle contre l’industrie des troupes romaines. Se croyant toutefois en sûreté, les Aduatikes raillèrent d’abord leur ennemi à cause de sa petite stature ; ils se moquèrent aussi de ses travaux.

Mais quand ils virent les tours roulantes s’approcher et dominer les obstacles derrière lesquels ils se croyaient hors d’atteinte, ils eurent recours à une ruse de guerre digne de leur