Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/23

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 15 —

gne, il donnait l’ordre aux tribuns qu’il voulait employer. Les tribuns le signifiaient aux centurions, ceux-ci à leurs décurions, qui distribuaient des armes à leurs subalternes, et les mettaient en marche ; de sorte qu’au premier signal du prince, la partie commandée se portait au rendez-vous.

Ce règlement fut changé par Servius. Il divisa le peuple en six classes. La dernière, composée des plus pauvres, fut dispensée des travaux de la guerre ; la cinquième ne fournissait que les troupes légères, qui cependant après quelques aimées de services, pouvaient devenir soldats de rang ; et ceux-ci se tiraient des quatre premières classes. Les cavaliers se prenaient dans les dix-huit centuries qui faisaient la tête de la première.

Servius ayant aussi divisé la ville en quatre parties, qu’il appela tribus, nomma par quartier un chef qui tenait registre du domicile de chaque citoyen. Quant à ceux qui habitaient hors de la ville et dans la campagne de Rome, il établit pour eux un ordre pareil, qui servait soit pour la levée des troupes, soit pour la répartition des impôts.

Il est clair que, selon cette division de classe, les plus riches allaient plus souvent à la guerre.

Des cent quatre-vingt treize centuries qui composaient tout le peuple romain, la première classe fournie par les plus riches en contenait seule quatre-vingt-dix-huit : en séparant les dix-huit centuries des cavaliers, il en restait quatre-vingt pour l’infanterie.

Dans les quatre-vingt-quinze qui faisaient les cinq autres classes, il fallait retrancher les deux dernières classes ou trente et une centuries : la dernière classe ne servait pas, la cinquième ne fournissait que les armés à la légère. Restait donc pour la seconde, la troisième et la quatrième classe, soixante-quatre centuries qui, jointes aux quatre-vingts de la première, formaient le nombre de cent quarante-quatre.

Ces cent quarante-quatre centuries étaient obligées de fournir chacune une égale quantité de soldats pesamment armés. Si l’on ajoute que celles de la première classe se trouvaient bien moins nombreuses que les autres, on reconnaîtra qu’en effet le fardeau de la guerre tombait sur les plus riches.

Nous allons voir avec quelle attention les Romains s’étudiaient à lever de bons soldats et à en balancer le mérite, afin que leurs légions eussent entre elles toute l’égalité que pouvait leur donner la prudence humaine. C’est Polybe qui va nous instruire de ce qui se pratiquait de son temps, c’est-à-dire dans le siècle où la discipline militaire fut portée au plus haut degré de perfection.

Polybe considère la levée des quatre légions qu’on avait coutume de mettre sur pied tous les ans. Voici comment il s’exprime : Quand les Romains ont nommé les consuls, ils établissent d’abord les tribuns. Ils en choisissent quatorze entre ceux qui ont cinq années de service, et dix qui ont servi dix ans. Le jour marqué pour le choix des soldats étant arrivé, et toute la jeunesse s’étant rendue au Capitole, les tribuns, qui n’ont que cinq ans de service, se divisent en quatre parts, autant qu’il y a de légions à lever. Les quatre qui ont été nommés les premiers, soit par le peuple, soit par les généraux, sont destinés à la première légion ; les trois suivans à la seconde ; les quatre d’ensuite à la troisième ; enfin les trois derniers à la quatrième. Les dix autres tribuns qui ont fait dix campagnes sont répartis de même, deux pour la première légion, trois pour la seconde, deux pour la troisième, trois pour la quatrième ; par ce moyen chaque légion aura six tribuns.