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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/285

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chercher leur subsistance chez des nations avec lesquelles il n’avait encore aucune alliance.

Afranius cependant fit sortir son armée, et la rangea en bataille sur la pente de la colline, sachant bien que, malgré toute l’envie que l’ennemi manifestait pour combattre, il ne grimperait pas jusqu’à lui. César s’était présenté de bonne heure, n’ayant que deux petites lieues à faire. Tout le reste du jour, les deux armées se regardèrent sans changer de place, l’une sur la hauteur dont elle ne voulait pas descendre ; l’autre dans la plaine, très-près de cette hauteur, et n’osant la gravir.

César se proposa de camper sur le lieu même où il était ; et malgré la proximité du camp d’Afranius, malgré le risque qu’il courait de d’établir en présence d’un ennemi qui avait à peine quelques centaines de pas à parcourir pour le joindre, il y réussit en couvrant ses travailleurs avec une partie de l’armée qui resta sous les armes, ce que nous avons dit ailleurs. Au moyen de sa grande supériorité en cavalerie, César devint ainsi maître de la plaine fertile située entre la Sègre et la Cinca ; et ses deux ponts lui assurèrent la communication avec le pays placé par delà la rivière, comme ils lui permettaient de protéger l’arrivée des grands convois qu’il attendait.

Il se flatta d’avoir saisi une occasion favorable pour frapper un coup décisif. La butte de terre qui se trouve aujourd’hui enfermée par les fortifications dans l’enceinte de la ville, en était alors séparée. Depuis cette butte jusqu’à la hauteur du fort Garden, hauteur qu’Afranius avait occupée, on voit un terrain uni d’environ trois cents toises. César n’évalue qu’à trois mille pas (géométriques) la plaine sur laquelle s’élevait cette butte entre la ville et le camp de l’ennemi.

Afranius avait négligé ce poste, soit qu’il se crût assez à portée de le soutenir, ou peut-être de dessein prémédité, pour en faire l’amorce d’un combat dont il attendait tout l’avantage.

César conçut l’idée de s’en rendre maître, et envisagea, dans la réussite de son projet, le moyen le plus prompt de changer la face des affaires.

Il suffit de jeter un coup d’œil sur la carte, pour se convaincre que, s’établissant ainsi entre Ilerda et le camp d’Afranius, César lui coupait toute communication avec les magasins renfermés dans la ville ; qu’il lui ôtait l’usage essentiel du pont de pierre sur la Sègre, et mettait les généraux de Pompée dans la nécessité d’engager une affaire générale, ou de s’éloigner promptement.

Mais le camp de César était assis vis-à-vis de la hauteur occupée par Afranius et Petreius, et se trouvait de cette manière plus éloigné qu’eux du poste qu’il avait en vue ; aussi, malgré tous ses efforts pour cacher son véritable dessein, ne put-il prévenir son ennemi. Il se livra plusieurs combats très-rudes et très-opiniâtres, dont tout l’avantage fut du côté des troupes de Pompée. César y fit une perte considérable, et ramena ses troupes au camp.

Si cet échec fut sensible à César, il lui survint pendant ce temps un désastre dont les suites semblaient devoir entraîner la ruine entière de son armée.

Ordinairement, dans ces contrées, les rivières débordent sur la fin d’avril. Comme elles prennent leur source aux Pyrénées, la fonte des neiges, qui se fait vers le retour de la belle saison, occasionne ces débordemens. Ils sont