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POLYBE, LIV. II.

passent de tous côtés. Il entra dans Argos par surprise ; mais il en fut ensuite chassé courageusement par les Achéens et par les Argiens mêmes, qui avaient du dépit de lui en avoir auparavant ouvert les portes. Ce projet renversé, il prit sa route par Mantinée, et s’en retourna ainsi à Sparte.

Sa retraite ouvrit l’entrée du Péloponnèse à Antigonus, qui prit aussitôt possession de l’Acrocorinthe. De là, sans s’arrêter, il marcha sur Argos, d’où, après avoir loué la valeur des habitans et réglé les affaires de la ville, il partit promptement, et mena son armée en Arcadie. Il chassa les garnisons de tous les forts qui avaient été élevés par ordre de Cléomène dans le pays des Égéens et des Belminates, et, y ayant mis une garnison mégalopolitaine, il vint à l’assemblée des Achéens à Égée. Il y rendit compte de sa conduite ; il proposa ses vues sur l’avenir, et on lui donna le commandement sur tous les alliés. Ensuite, après être resté quelque temps en quartier d’hiver autour de Sicyone et de Corinthe, le printemps venu, il fit marcher son armée et arriva en trois jours à Tégée, où les troupes des Achéens le vinrent joindre. Il y plaça son camp, et commença à en faire le siége, qui fut poussé par les Macédoniens avec tant de vigueur, que les Tégéates, ne pouvant ni le soutenir ni se défendre contre les mines des assiégeans, en vinrent en peu de temps à une composition. Antigonus, s’étant assuré de la ville, passe à de nouveaux exploits, et se hâte d’arriver dans la Laconie. Il s’approche de Cléomène, qui en gardait les frontières, et tâche de l’engager à un combat par quelques escarmouches. Cependant il apprend par ses coureurs qu’il venait à Cléomène du secours d’Orchomène. Il lève aussitôt le camp, et s’avance vers cette ville. Il l’emporte d’assaut, et va mettre le siége devant Mantinée, qui prit d’abord l’épouvante et ouvrit ses portes. Il marcha aussitôt vers Érée et Telphysse, dont les habitans se soumirent volontairement. Enfin, l’hiver approchant, il revint à Égée pour se trouver à l’assemblée des Achéens. Il renvoya les Macédoniens prendre leurs quartiers d’hiver dans leur pays. Pour lui, il resta à Égée pour délibérer avec les Achéens sur les affaires présentes.

Dans le temps qu’il y était, Cléomène, voyant que les troupes étaient licenciées, qu’Antigonus n’avait avec lui à Égée, que des soldats étrangers, qu’il était éloigné de Mégalopolis de trois journées de chemin, que cette ville était difficile à garder, à cause de sa grandeur et du peu de monde qu’il y avait ; qu’actuellement elle était mal gardée, parce qu’Antigonus était proche, et, ce qui le flattait davantage, que les deux batailles de Lycée et de Laodicée, avaient fait périr la plupart des habitans en âge de porter les armes, il gagna quelques fuyards messéniens qui se trouvaient alors dans la ville, et, par leur moyen, y entra pendant une nuit, sans être aperçu de personne. Mais à peine le jour parut, que les Mégalopolitains se défendirent avec tant de courage, que Cléomène non-seulement fut chassé, mais courut encore risque d’une défaite entière. Même affaire lui était encore arrivée trois mois auparavant, lorsqu’il entra par ruse dans la ville par l’endroit qu’on appelle Colée. Mais alors, comme son armée était plus nombreuse, et qu’il s’était emparé le premier des postes les plus avantageux, il vint à bout de son dessein. Il chassa les Mégalopolitains et se rendit maître de la ville, qu’il saccagea et qu’il détruisit avec tant de cruauté, que l’on avait perdu toute espérance qu’elle pût