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POLYBE, LIV. XVIII.


V.


La paix avec Philippe est ratifiée à Rome. — Création de dix commissaires pour régler les affaires de la Grèce. — Les Achéens demandent en vain à faire alliance avec les Romains.


Claudius Marcellus ayant été fait consul, arrivèrent à Rome, de la part de Philippe, de Flaminius et des alliés, des ambassadeurs au sujet de la paix qu’on se proposait de faire avec le roi de Macédoine. Il se tint dans le sénat de longs discours sur cette paix, mais enfin il se déclara pour les conditions auxquelles Philippe s’était engagé. L’affaire rapportée au peuple, Marcellus, qui souhaitait avec passion d’aller commander les armées dans la Grèce, y mit opposition, et fit tous ses efforts pour que le traité fût rompu ; mais il ne put empêcher que le peuple n’approuvât le projet de Flaminius, et ne ratifiât les conditions. Le sénat nomma ensuite dix des plus illustres citoyens pour aller en Grèce, en régler les affaires avec Flaminius et assurer la liberté aux Grecs. Damoxène d’Égée, ambassadeur des Achéens, se présenta en même temps dans le sénat pour le prier de recevoir les Achéens parmi les alliés du peuple romain. Mais on trouva de la difficulté à leur accorder cette grâce, parce que les Éléens étaient en différend avec eux pour la Triphylie, les Messéniens déjà alliés des Romains pour Asine et Pylos, et les Étoliens pour Érée. On renvoya cette affaire aux dix commissaires ; il ne se passa rien autre chose alors dans le sénat. (Ambassades.) Dom Thuillier.


Les Béotiens commencent à se détacher des Romains. Brachylles, général des Béotiens, est tué par les partisans des Romains.


En Grèce, après la bataille de Cynoscéphales, pendant que Flaminius était en quartier d’hiver à Élatée, les Béotiens députèrent au consul, pour lui demander le retour des soldats de leur nation qui avaient servi dans l’armée de Philippe. Flaminius, qui se précautionnait contre Antiochus, se fit un plaisir, pour gagner leur amitié, de renvoyer leurs soldats, entre lesquels était un nommé Brachylles. Mais à peine les eurent-ils reçus, qu’ils firent de ce Brachylles leur général. Ils témoignèrent aussi faire un cas particulier des autres amis de la maison de Macédoine, et ne les élevaient pas moins aux dignités qu’auparavant. Bien plus, ils poussèrent l’ingratitude jusqu’à envoyer des ambassadeurs à Philippe, pour le remercier de leur avoir rendu leurs soldats. Ce procédé choqua Zeuxippe, Pisistrate et tous les amis du peuple romain, qui, prévoyant l’avenir, craignirent pour leur famille et pour eux-mêmes. En effet, les Romains une fois sortis de la Grèce, quelle sûreté devait-il y avoir pour eux dans la Béotie, pendant que Philippe serait à portée de soutenir et d’appuyer leurs ennemis ? Ils députèrent donc de concert à Flaminius. Les députés entretinrent long-temps le consul sur la haine dont la populace était animée contre eux, et sur l’ingratitude de la nation. Ils allèrent jusqu’à lui dire que si, pour effrayer les autres, on ne faisait mourir Brachylles, les amis du peuple romain ne pourraient vivre en sûreté dans la Béotie, dès que les armées en seraient sorties. Flaminius dit qu’il ne prendrait point de part à ce dessein ; mais qu’au reste il ne leur défendait pas de l’exécuter, et qu’ils communiquassent cette affaire à Alexamène, général des Étoliens. Zeuxippe obéit, et parla à ce général, qui, acquiesçant au projet, donna ordre à trois Étoliens et trois Italiens de tuer