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POLYBE, LIV. XVIII.

Brachylles. (Ambassades.) Dom Thuillier.


Il n’est aucun témoignage plus redoutable, plus grave que celui qui réside en nous-mêmes, la conscience. (In cod. Urbin.) Dom Thuillier.


Sénatus-consulte sur la paix faite avec Philippe. — Les Étoliens seuls en sont mécontens, et le déchirent. — Un héraut dans les jeux Isthmiques publie le sénatus-consulte décrété pour la liberté des Grecs. — Réponse de Flaminius et des dix commissaires aux ambassadeurs d’Antiochus, de Philippe et des Étoliens.


Vers ce temps-là vinrent de Rome les dix commissaires qui devaient régler les affaires de la Grèce. Ils apportèrent avec eux le sénatus-consulte sur la paix avec Philippe. En voici les articles : « Tous les Grecs, tant ceux d’Asie que ceux d’Europe, seront libres et se gouverneront selon leurs lois. Philippe livrera aux Romains tous les Grecs qui sont en sa puissance, et toutes les villes où il tient garnison, et cela avant la fête des jeux Isthmiques ; il retirera les garnisons d’Eurome, de Pédase, de Bargyle, de Jessé, d’Abydos, de Thasos, de Myrine, de Périnthe, et laissera ces villes jouir de la liberté. Sur la délivrance des Cianiens, Titus écrira au roi Prusias quelles sont les intentions du sénat. Philippe rendra aux Romains les prisonniers et les transfuges dans le même temps, et outre cela, les vaisseaux pontés, à l’exception de cinq felouques et de la galère à seize bancs de rameurs. Il donnera mille talens, moitié incessamment, et l’autre moitié dans dix ans, cinquante chaque année en forme de tribut. »

Quand ce sénatus-consulte se fut répandu parmi les Grecs, la confiance qu’il leur inspira et la joie qu’il leur donna ne se peuvent exprimer. Les seuls Étoliens, mécontens de n’avoir point obtenu ce qu’ils avaient espéré, affectaient de le décrier, disant qu’il ne contenait que des paroles et rien davantage. Pour indisposer les esprits contre ce décret, ils fondaient leur médisance sur certaines probabilités qu’ils tiraient de la manière même dont il était conçu. Ils disaient qu’au sujet des villes où Philippe avait garnison, le sénatus-consulte ordonnait deux choses : la première, qu’il retirât ces garnisons et livrât les villes aux Romains ; l’autre, qu’en retirant les garnisons, il mît les villes en liberté ; que celles qui reprenaient leur liberté étaient nommées par leur nom, et que c’étaient celles de l’Asie ; et que celles qui étaient données aux Romains, étaient celles de l’Europe, savoir : Orée, Érétrie, Chalcis, Démétriade, Corinthe. D’où il était aisé de voir que les Romains ne faisaient maintenant qu’occuper la place de Philippe, que la Grèce n’était pas délivrée de ses chaînes, et que tout au plus elle avait changé de maître. Voilà ce que les Étoliens disaient et répétaient sans cesse.

Flaminius et les dix commissaires d’Élatée s’en allèrent à Anticyre et de là à Corinthe, où ils tinrent de fréquens conseils sur l’état présent des affaires. Pour empêcher les mauvais effets des bruits que les Étoliens répandaient dans toute la Grèce, et dont quelques hommes étaient frappés, le consul se crut obligé de mettre cette affaire en délibération. Il n’y eut pas de raisons qu’il n’employât pour faire voir aux commissaires que s’ils voulaient chez les Grecs immortaliser le nom romain et les persuader qu’en venant chez eux, ce n’était pas le propre intérêt, mais la liberté de la Grèce