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végèce, liv. i.

la légèreté que demandent les exercices du saut et de la course, il ne faut pas attendre que les années l’aient appesanti ; c’est cette légèreté entretenue par l’usage qui fait le bon soldat. Autrefois, dit Salluste, dès que la jeunesse était en âge de porter les armes, on l’exerçait dans les camps : ne vaut-il pas mieux qu’un soldat, tout dressé, se plaigne de n’avoir pas la force de se battre, que de le voir se désoler de n’être plus en état de le faire ? Ne faut-il pas aussi un certain temps pour tout apprendre ? car la science de la guerre est d’une grande étendue, soit qu’il faille former des archers ou en faire de bons tireurs à pied ou à cheval ; soit qu’on veuille montrer aux légionnaires toutes les parties de l’escrime, à ne point abandonner leurs places, à ne point confondre les rangs, à lancer des armes de jet d’une main ferme et assurée, à creuser le fossé, à planter avec art les palissades, à bien manier le bouclier, à te présenter obliquement aux traits de l’ennemi, à parer adroitement les coups de fer et à les porter hardiment. Il est certain qu’un soldat, formé à tous ces exercices, ne trouvera point d’ennemis redoutables, et que le champ de bataille n’aura pour lui que des charmes.


CHAPITRE V.

De la taille des nouveaux soldats.

Je sais que le consul Marius exigeait pour la cavalerie légère et pour les premières cohortes de chaque légion des hommes de six pieds, ou au moins de cinq pieds dix pouces ; mais le peuple romain était plus nombreux alors, et plus porté à la guerre. Le goût des emplois civils n’emportait pas, comme aujourd’hui, la plus brillante jeunesse ; ainsi, dans l’impossibilité où nous sommes actuellement de réunir la taille et la vigueur, il faut préférer celle-ci. Homère nous y autorise en nous représentant Tidée comme un homme de très-grand courage, quoique de très-petite taille.


CHAPITRE VI.

A quelles marques on reconnaît les jeunes gens propres à la guerre.

Celui qui sera chargé de choisir des soldats ne saurait trop chercher dans les yeux, dans les traits du visage, dans la conformation de toutes les parties du corps ce qui promet un bon soldat ; car certains signes annoncent la vigueur, non-seulement dans les hommes, mais encore dans les chevaux, dans les chiens même, dans les abeilles, si l’on en croit Virgile. Il y en a, dit-il, de deux sortes : on reconnaît l’activité des unes à leur figure agréable, aux petites écailles brillantes dont elles sont couvertes ; paresse des autres, à leur figure, hideuse, à la langueur, à la pesanteur avec laquelle elles se traînent. Il faut donc examiner si le jeune homme qu’on destine à la guerre a l’œil vif, la tête droite, la poitrine large, les épaules traversées de muscles, les bras longs, le poignet fort, le ventre peu étendu, la jambe menue, le gras de la jambe et le pied débarrassés de chairs superflues, mais resserrés, au contraire, par la dureté des nerfs qui s’y entrelacent. Lorsque vous apercevrez ces marques, préférez-les à la haute taille ; car il vaut beaucoup mieux qu’un soldat soit vigoureux que grand.