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HISTOIRE DE LA COMMUNE DE 1871

Prussiens lui ont prêté la zone neutre. Avec l’aide de Bismarck, Clinchant et Ladmirault vont étreindre les buttes par les deux flancs.

Tout près d’être cerné dans la mairie du XVIIe Malon ordonne la retraite sur Montmartre. On y dirige aussi un détachement de vingt-cinq femmes qui viennent s’offrir sous la conduite des citoyennes Dimitrieff et Louise Michel. Malon et ses amis peuvent s’échapper par une issue.

Clinchant poursuit sa route et vient se heurter contre la barricade de la place Clichy. Il faut pour réduire ces pavés mal agencés et derrière lesquels cinquante hommes à peine combattent, l’effort combiné des Versaillais de la rue de Saint-Pétersbourg et de leurs tirailleurs du collège Chaptal. Les fédérés, n’ayant plus d’obus, chargent avec des pierres et du bitume ; leur poudre épuisée, ils se replient sur la rue des Carrières. Ladmirault, maître de l’avenue de Saint-Ouen, tourne leur barricade par le cimetière Montmartre. Une vingtaine de gardes refusent de se rendre. Les Versaillais les fusillent.

En arrière, le quartier des Épinettes lutte quelque temps encore ; peu à peu, toute résistance cesse et, vers neuf heures, les Batignolles appartiennent à l’armée.

L’Hôtel-de-Ville ne sait rien du progrès des troupes quand Vermorel y vient chercher des munitions pour Montmartre. Il repart avec des fourgons et ne peut gagner les buttes que cernent les Versaillais.

Maîtres des Batignolles il leur suffit d’étendre la main pour s’emparer de Montmartre. Les buttes semblent mortes. La panique s’y est répandue dans la nuit. Les bataillons se sont amincis, évanouis. Le chef de la 18e légion, Millière homonyme du député, est incapable d’une initiative vigoureuse. Des individus qu’on vit quelques heures plus tard dans les rangs de l’armée, ont semé les fausses nouvelles, arrêté à chaque instant des chefs civils ou militaires, sous le prétexte qu’ils trahissaient. Une centaine d’hommes seulement garnissent le versant du nord. Quelques barricades ont été commencées pendant la nuit, très mollement ; les femmes seules ont montré de l’ardeur.