Page:Lissagaray - Histoire de la Commune de 1871, MS.djvu/68

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

sion soit chargée de faire les élections dans les quarante-huit heures. Les noms de Dorian, le seul ministre qui ait pris la défense au sérieux, de Louis Blanc, Ledru-Rollin, Victor Hugo, Raspail, Delescluze, Blanqui, Félix Pyat, Millière sont acclamés.

Si cette commission avait pu faire évacuer et garder l’Hôtel-de-Ville, afficher une proclamation, la journée était finie, salutaire. Mais Dorian refusa ; Louis Blanc, Victor Hugo, Ledru-Rollin, Raspail, Félix Pyat se tinrent cois ou tournèrent les talons. Flourens a le temps d’arriver. Il fait irruption avec ses tirailleurs de Belleville, monte sur la table autour de laquelle se tiennent les membres du Gouvernement, les déclare prisonniers et propose un Comité de salut public. Les uns applaudissent, d’autres protestent, déclarent qu’il ne s’agit pas de substituer une dictature à une autre. Flourens l’emporte, lit des noms, le sien d’abord, ensuite Blanqui, Delescluze, Millière, Ranvier, Félix Pyat, Mottu. D’interminables discussions s’engagent. Les hommes du 4 Septembre se sentent sauvés malgré les gardes nationaux qui les tiennent, et sourient de ces vainqueurs qui laissent fuser leur victoire.

Dès lors on se perd dans un dédale d’imbroglios. Chaque salle a son gouvernement, ses orateurs, ses tarentules. Si noire est la tourmente que, vers huit heures, des gardes nationaux réactionnaires peuvent, sous le nez de Flourens, enlever Trochu et Ferry. D’autres, à côté, emportent Blanqui que des francs-tireurs délivrent. Dans le cabinet du maire, Étienne Arago et ses adjoints convoquent pour le lendemain les électeurs sous la présidence de Dorian et de Schœlcher. Vers dix heures leur affiche est placardée dans Paris.

Paris, toute la journée, avait regardé faire. « Le 31 octobre au matin, » a dit Jules Ferry, « la population parisienne nous était, du haut en bas de l’échelle, absolument hostile[1]. Tout le monde trouvait que nous méritions d’être destitués. » Un des meilleurs bataillons trochéens, conduit au secours du Gouverne-

  1. Enquête sur le 4 Septembre, Jules Ferry.