Page:Lissagaray - Les huit journees de mai, Petit Journal Bruxelles, 1871.djvu/207

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putréfies ou mangés par la vermine du cadavre. Ces débris, enfermés dans des wagons clos comme pour les apports de l’amphithéâtre, furent conduits à grande vitesse au cimetière Montparnasse, où d’immenses trous attendaient toute cette pourriture. Les fusillés du Luxembourg furent amenés au même cimetière, entassés dans des charrettes et des omnibus. A travers les fenêtres de ces voitures, on voyait passer des bras et des pieds. Des fosses de dix mètres carrés et de la même profondeur avaient été creusées. De nombreux ouvriers plaçaient les cadavres vingt par vingt et les recouvraient de chaux ou de goudron et ensuite de terre. Les fédérés, rangés côte à côte, n’avaient d’autre linceul que leurs habits de gardes nationaux. De pauvres femmes, debout sur le bord de la lugubre tranchée, accablées de douleur, cherchaient à reconnaître les corps. Quelques-unes portaient des couronnes d’immortelles, sur lesquelles on lisait une date : Mai 1871, et cette seule inscription : A mon mari ou A mon enfant. Dans le commencement, les soldats les repoussèrent, mais bientôt on donna l’ordre de les laisser approcher, afin que leur douleur les trahissant, on pût arrêter « ces femelles d’insurgés. » Il n’appartenait qu’au parti de