Page:Lissagaray - Les huit journees de mai, Petit Journal Bruxelles, 1871.djvu/225

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coin obscur de la Conciergerie a caché la millième partie des tortures qui s’étalaient en plein soleil au camp de Satory ?

« Ils sont là, disait l’Indépendance française, plusieurs milliers, empoisonnés de crasse et de vermine, infectant à un kilomètre à la ronde.

» Des canons sont braqués sur ces misérables, parqués comme des bêtes fauves.

» Les habitants de Paris craignent l’épidémie résultant de l’enfouissement des insurgés tués dans la ville ; ceux que l’Officiel de Paris appelait les ruraux craignent bien davantage l’épidémie résultant de la présence des insurgés vivants au camp de Satory. »

On les avait jetés là, en plein air, tête découverte ; ils couchaient dans la boue, n’ayant d’autre nourriture que du biscuit gâté et de l’eau infecte puisée à une mare dans laquelle les gardiens ne se gênaient pas pour faire leurs ordures. Les premières nuits furent très-froides, il plut beaucoup. Dans celle du vendredi 26, dix-sept d’entre eux moururent.

Le grand mur d’enceinte du camp était crénelé. Par des trous de distance en distance passait la bouche des mitrailleuses, qu’on avait eu soin auparavant de faire défiler devant les prisonniers. Des deux côtés de la porte centrale, des