Page:Liszt - F. Chopin, 1879.djvu/222

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La campagne et la vie de château lui convenaient tellement, que pour en jouir il acceptait une société qui ne lui convenait pas du tout. On pourrait en induire qu’il lui était plus aisé d’abstraire son esprit des gens qui l’entouraient, de leur partage bruyant comme le son des castagnettes, que d’abstraire ses sens de l’air étouffé, de la lumière terne, des tableaux prosaïques de la ville, où les passions sont excitées et surexcitées à chaque pas, les organes rarement flattés. Ce que l’on y voit, ce que l’on y entend, ce que l’on y sent, frappe au lieu de bercer ; fait sortir de soi, au lieu de faire rentrer en soi. Chopin en souffrait, mais ne se rendait pas compte des ce qui l’offusquait, aussi longtemps que des salons amis l’attendirent et que la lutte des opinions littéraires et artistiques le préoccupa vivement. L’Art pouvait lui faire oublier la Nature ; le Beau dans les créations de l’homme pouvait lui remplacer pour quelque temps le Beau des créations de Dieu ; aussi, aimait-il Paris. Mais, il était heureux chaque fois qu’il pouvait le laisser loin derrière lui !

A peine était-il arrivé dans une maison de campagne, à peine se voyait-il entouré de jardins, de vergers, de potagers, d’arbres, de hautes herbes, de fleurs telles quelles, qu’il semblait un autre homme, un homme transfiguré. L’appétit lui revenait, sa gaieté débordait, ses bons-mots pétillaient. Il s’amusait de tout avec tous, devenait ingénieux à varier les anmsemens, à multiplier les épisodes égayans de cette existence