Page:Liszt - F. Chopin, 1879.djvu/225

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d’âme, d’esprit ou de talent. En voyant ce petit être souffrant et souriant, toujours patient et enjoué, on lui sut tellement gré de ne devenir ni maussade, ni fantasque, que l’on se contenta sans doute de chérir ses qualités, sans se demander s’il donnait son cœur sans réserve et livrait le secret de toutes ses pensées. Il est des âmes qui, à l’entrée de la vie, sont comme de riches voyageurs amenés par le sort au milieu de simples pâtres, incapables de reconnaitre le haut rang de leurs hôtes ; tant que ces êtres supérieurs demeurent avec eux, ils les comblent de dons qui sont nuls relativement à leur propre opulence, suffisans toutefois pour émerveiller des cœurs ingénus et répandre le bonheur au sein de leurs paisibles accoutumances. Ces êtres donnent en affectueuses expansions bien plus que ceux qui les entourent ; on est charmé, heureux, reconnaissant , on suppose qu’ils ont été généreux, tandis qu’en réalité ils n’ont encore été que peu prodigues de leurs trésors.

Les habitudes que Chopin connut avant toutes autres, entre lesquelles il grandit comme dans un berceau solide et moelleux, furent celles d’un intérieur uni, calme, occupé ; aussi ces exemples de simplicité, de piété et de distinction, lui restèrent toujours les plus doux et les plus chers. Les vertus domestiques, les coutumes religieuses, les charités pieuses, les modesties rigides, l’entourèrent d’une pure atmosphère, où son imagination prit ce velouté tendre des plantes qui ne