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vait s’élever à une hauteur peu ordinaire. Le thème religieux déjà englouti une première fois par ce susurrement de notes, qui frôlent l’oreille comme des haleines embrasées, chatouillent le bout des doigts, troublent le cerveau, agacent les nerfs comme des promesses fabuleuses et des enchantemens incompréhensibles, et devant surgir encore devant ce délire halluciné, cette pâmoison volupteuse, risquait d’apparaître froid, morne, sec, aride, aussi vide qu’une négation en face d’une félicité ; de n’être qu’une sorte de ressort usé, d’antagonisme commun, de contraste brusque, mais peu concluant. Il n’en a pas été ainsi. Le motif saint ne se dresse point comme un rude maître, imposant durement silence aux licencieux chuchottemens, qui grouillent en cet antre de joies terribles. Il ne reste point sombre et isolé, en leur présence. Il arrive limpide et doux, pour s’emparer de toutes les cordes dont la résonnance est une si charmante amorce ; il les saisit une à une, quoiqu’ elles se disputent à lui avec un acharnement désespéré. Mais toujours calme et placide, il étend son domaine malgré ces résistances, en transformant, en s’assimilant les élémens contraires. Les masses des tons ardens se détachent en débris, qui forment des discordances toujours plus pénibles, jusqu’à ce qu’elles deviennent répulsives comme des parfums en décomposition, et que nous le voyions avec bonheur, se fondre dans l’auguste magnificence du Cantique, qui inonde de sa pompe