végétal les matières que celui-ci forme et emmagasine en quantités relativement considérables ; mais qu’il aurait été appelé lui-même à utiliser à un moment donné. « L’identification de l’organisme animal à un fourneau dans lequel vient se brûler le règne végétal peut répondre seulement à l’apparence chimique extérieure des phénomènes ; mais ce n’est pas une vue vraiment physiologique. Le physiologiste, qui descend dans la nature même des phénomènes pour en comprendre le but, ne saurait se contenter de ces rapprochements superficiels. En effet, si le chimiste voit le sucré formé dans la betterave se brûler dans l’animal qui la mange, le physiologiste ne trouve là qu’un accident ; il démontre, au contraire, que ce sucre formé et emmagasiné est destiné à être brûlé par la betterave elle-même dans la seconde année de sa végétation, lors de sa floraison et de sa fructification. Sans doute les animaux herbivores mangent les plantes, et les animaux carnivores mangent les herbivores ; mais ce sont là des résultats d’équilibre des lois cosmiques qui sont en réalité en dehors de la finalité des lois physiologiques. »
— Les développements que nous venons de donner à propos de la nutrition comparée chez les animaux et les végétaux montrent déjà d’une manière caractéristique avec quelle grandeur de vues Claude Bernard concevait l’objet de la physiologie générale. Si nous nous bornons à la physiologie générale des animaux, nous pouvons dire qu’à ce point de vue l’œuvre de Claude Bernard a eu surtout pour résultat de bien établir la distinction des fonctions qui constituent la vie proprement dite de celles qui établissent seulement les mécanismes préliminaires et plus ou moins nécessaires à l’accomplissement des actes intimes.
Pour donner une idée de ces mécanismes, prenons comme exemple le sang et sa circulation, et indiquons rapidement la conception si heureuse et si universellement adoptée aujourd’hui, que Claude Bernard a désignée sous le nom de fonctions du milieu intérieur. Chez les végétaux et chez les animaux inférieurs, les phénomènes de la vie sont, sous une indépendance étroite, liés aux variations thermiques et autres du milieu cosmique ; mais chez les animaux à sang chaud, il y a, à cet égard, une indépendance presque complète, notamment chez l’homme, et en général chez les animaux qui peuvent disposer en tout temps d’une