Page:Livre du Chevalier de La Tour Landry.djvu/172

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Chappitre XLIXe
Cy parle de tenir moyen estat


Celle se tient à la mieulx venue qui premierement se cointoye ; mais celles qui premierement prennent telles nouveautés, ce dit le preudomme, ressemblent aux juennes femmes qui se souillèrent en la boue, dont l’en se bourde d’elles et de leur chemin nouvel. Et celles qui se tiennent plus meurement et simplement, ce sont les saiges qui alèrent le grant chemin seur ; car l’on ne se puet bourder de celles qui se tiennent meurement. Je ne dy mie, puisque l’estat et la nouvelleté est courant par tout et que toutes s’y prennent, il convient qu’elles suyvent le siècle et facent comme les autres. Mais les saiges y doivent reculer le plus qu’elles peuvent, et au fort en prendre sur elles avant moins que plus, et elles ne se hasteront pas tant de venir au devant comme celles qui cheyrent en la boue pour cuidier venir les premières, et elles furent les derrenières, et furent souilliées et honnyes. Pour ce, mes chières filles, est-il bon de ne se haster, point et de tenir le moyen estat, c’est à en faire plus sur le moins que sur le plus. Maiz il est aujourd’huy un si meschant siècle ; car se aucune jolie ou aucune nice prent aucune nouveaulté et aucun nouvel estat, tantost chacune dira à son seigneur : « Sire, l’en me dist que telle a telle chose qui trop bel est et trop