Page:Livre du Chevalier de La Tour Landry.djvu/180

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ardant. Et après, quant il luy ot fait souffrir ce martire, qui moult longuement dure, un autre annemy moult hideux vint à grans dens hideuses et aigues, la prendre au visaige et luy broyer et maschier, et après cela vint avecques grans brandons de feu ardant luy enflamber et bouter en visaige si effrayement et douleureusement que l’ermite en avoit telle paour et hideur qu’il trambloit tout, mais l’ange l’asseura et luy dist qu’elle l’avoyt bien desservy ; si demanda pourquoy et il respondy : Pour ce qu’elle s’estoit fardée et peinte le visaige pour plaire au monde, et que c’estoit un des pires pechiez qui feust et qui plus desplaisoit à Dieu, car c’estoit pechié d’orgueil, par lequel l’en attrait le pechié de luxure et tous aultres pechiéz mortelx dont le monde perit par le déluge et depuis plusieurs citez en sont arses et fondues en abisme, car sur toute rien il desplait au créateur, qui tout fourma, dont l’en se veult donner plus grant beaulté que nature ne luy apporte, et si ne souffist pas à homme ne à femme estre fait et compassé à sa saincte ymaige où les sains angels tant se delitent ; car si Dieu eust voulu, de sa sainte pourveance, elles n’eussent pas esté femmes, ainsçois les eust faictes bestes mues ou serpens. Et donc pourquoy regardent-elles à la grant beauté que Dieu leur a faictes, et pourquoy mestent-elles à leur visaige ou à leurs chiefs aultre chose que Dieux leur a donné. Et pour ce n’est-il mie de merveilles se elles endurent ceste penitence, car ceste, dist l’angel, l’a bien deservy, et alez veoir le corps, et vous verrés le visaige moult effrayé et hideux. Sire, dit l’ermite, sera-elle guères en cellui tourment ?