Page:London - Belliou la fumée, trad. Postif, 1941.djvu/118

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
112
BELLIOU-LA-FUMÉE

— Un système ! grogna le Courtaud ; et il regarda son compagnon d’un air de profonde pitié. La Fumée, crois-en ton camarade de harnais et laisse les systèmes tranquilles. Les systèmes sont sûrs de perdre. Il n’y a pas de bosses dans les systèmes.

— C’est pourquoi je les aime, répondit la Fumée. Un système, c’est une affaire de statistique. Quand tu tiens le bon système, tu ne peux pas perdre ; et c’est là la différence entre lui et la bosse. Tu ne sais jamais quand la bosse va de travers.

— Mais je sais un tas de systèmes qui sont allés de travers, et je n’ai jamais vu un système gagner. »

Le Courtaud fit une pause et poussa un soupir :

« Écoute, la Fumée, si tu deviens maboul sur les systèmes, cet endroit-ci ne vaut rien pour toi, et il serait temps que nous reprenions la piste. »

II

Durant les quelques semaines suivantes, les deux associés jouèrent aux propos interrompus. La Fumée semblait s’être juré de passer tout son temps à observer la roulette à la Corne d’Elan, et le Courtaud n’était pas moins obstiné à vouloir repartir. La Fumée finit par mettre obstacle au projet de son camarade quand celui-ci lui proposa une excursion de trois cent vingt kilomètres pour descendre le Yukon.

« Écoute, le Courtaud, dit-il, je ne marche pas. Ce voyage-là prendrait dix jours, et d’ici là j’espère que ma martingale sera en état de fonctionner. Pourquoi diable veux-tu me traîner comme cela dans le pays ?