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Page:London - Belliou la fumée, trad. Postif, 1941.djvu/185

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BELLIOU-LA-FUMÉE

nant la flèche, passa à quatre mètres de distance. Cependant l’ombre était si profonde que la Fumée l’entendit sans le voir.

Sur la plaine de glace, près du Poste de commerce à Sixty Mile, la Fumée rattrapa deux autres traîneaux. Tous venaient de relayer, et pendant cinq minutes les trois coururent de front, chaque homme, à genoux, prodiguant des coups de fouet et des cris aux chiens affolés. Mais la Fumée avait étudié cette partie du trajet. Il reconnut sur la rive un grand pin qui s’estompait à la lueur des nombreux foyers. En aval de cet arbre, non seulement l’obscurité redevenait absolue, mais le terrain cessait brusquement d’être uni, et la Fumée savait qu’en cet endroit la piste se rétrécissait brusquement à la largeur d’un unique traîneau.

Se penchant en avant, il empoigne la remorque et rapproche du chien de pivot le traîneau bondissant. Il saisit l’animal par les pattes de derrière et le renverse. La bête, avec un hurlement de rage, essaye de le mordre, mais est traînée par le reste de l’attelage, et son corps fait office de frein. Pendant ce temps les deux autres traîneaux, toujours de front, se précipitaient en avant vers la voie étroite.

La Fumée entendit le fracas et les cris de la collision. Il lâcha son chien de pivot, s’élança vers la flèche et fit obliquer son attelage à droite. Les animaux barbotèrent jusqu’au cou dans la neige molle. Ce fut un travail exténuant ; mais la Fumée dépassa les traîneaux enchevêtrés et gagna la piste bien tassée qui s’étendait au-delà.