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BELLIOU-LA-FUMÉE

Une des épreuves dont il avait le plus souffert était celle de la nourriture. Son énorme dépense d’énergie provoquait un appétit considérable ; mais son estomac n’était pas habitué à digérer ces quantités de lard et de haricots rouges, durs et toxiques. Il en résulta des alternatives d’indigestion et d’inanition auxquelles sa santé faillit succomber. Puis tout à coup survint l’heureux jour où il put dévorer n’importe quoi comme un animal affamé, et en redemander avec des yeux de loup.

Quand ils eurent transbordé leur bagage sur les ponts de bûches au débouché du cañon, ils durent modifier leurs plans, car le bruit s’était répandu à travers le défilé que les pionniers arrivés sur les bords du lac Linderman étaient en train d’abattre les derniers arbres disponibles pour la construction de bateaux. Les deux cousins, portant sur le dos leurs provisions de bouche, leurs couvertures et leurs outils, avec la scie pliante, partirent en avant, laissant Kit et l’oncle trimbaler l’équipement. Désormais les deux hommes se partagèrent la cuisine et opérèrent le portage côte à côte.

Le temps fuyait, et déjà les premières neiges blanchissaient les sommets. Se laisser surprendre par elles en deçà du défilé aurait entraîné un retard de près d’une année. Le vieux courba son dos de fer sous un poids de cent livres : le jeune homme en fut estomaqué, mais il serra les dents et attacha ses propres courroies à un faix de même poids. C’était pénible, mais il avait attrapé le coup ; son corps, purgé de graisse et de mollesse, commençait à se durcir en muscles maigres et résistants. En outre, Kit faisait des observations et tirait des plans. Ayant remarqué que les Indiens portaient des brides de tête en supplé-