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BELLIOU-LA-FUMÉE

mocassins. Mais, de plus, il reconnut entre toutes la démarche qu’il avait naguère résolu de ne jamais oublier.

« Ça, pour sûr, c’est une marcheuse, lui confia le Courtaud d’une voix rauque. Je parierais que c’est une Indienne.

— Comment allez-vous, mademoiselle Gastell ? héla La Fumée.

— Comment allez-vous ? répondit-elle en tournant la tête pour jeter un rapide coup d’œil. Il fait trop sombre pour voir. Qui êtes-vous ?

— La Fumée. »

Un rire frais s’égrena dans la gelée, et c’était certainement le plus joli gazouillis qu’il eût entendu de sa vie.

« Alors, êtes-vous marié et avez-vous élevé tous les enfants dont vous parliez ? »

Sans lui laisser le temps de répondre, elle continua :

« Combien de Chéchaquos y a-t-il en arrière ?

— Plusieurs milliers, je crois. Nous en avons passé plus de trois cents. Et ils ne perdaient pas de temps.

— C’est la vieille histoire, dit-elle avec amertume. Les nouveaux venus s’emparent des gîtes riches, et les vieilles barbes qui ont eu l’audace et tous les déboires, ceux qui ont créé le pays, n’ont rien. Ce sont des vieux de la vieille qui ont découvert la rivière de la Squaw — je me demande comment la découverte a transpiré — et ils en ont fait parvenir l’avis à tous les durs à cuire du Sea-Lion. Mais cette localité est à quinze kilomètres au-delà de Dawson, et quand ils arriveront ils trouveront la rivière jalonnée jusqu’à l’horizon par les Chéchaquos de Dawson. Ce n’est pas bien, ce n’est pas juste, cette persistance de déveine !