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Page:London - Contes des mers du Sud, trad. Postif et Gruyer, 1948.djvu/225

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Le cocotier qui portait Raoul oscillait d’une façon non moins alarmante. Une des femmes sanglotait, en pressant contre elle sa fillette qui, sur sa poitrine, serrait son chat, non moins tendrement.

Celui des hommes qui était le plus proche de Raoul lui toucha le bras, l’invitant à regarder dans la direction qu’il lui indiquait.

Raoul regarda et vit l’église mormone, construite en bois, arrachée de ses fondations, zigzaguer comme un ivrogne à quelque trente mètres de distance.

Le vent la poussait vers le lagon, et elle vint heurter, sur sa route, un bouquet de cocotiers.

La grappe de fruits humains qu’ils portaient dégringola, sous le choc, comme des noix mûres.

Hommes, femmes et enfants se débattirent, pareils à des fourmis, dans le bouillonnement d’une vague qui les avait aussitôt raflés : en un clin d’œil, ils furent emportés dans son reflux.

Raoul regardait froidement ces scènes d’horreur, qui en venaient à lui sembler irréelles. Il vit encore une vague, plus colossale que les précédentes, s’abattre sur l’église mormone et l’entraîner avec elle dans le lagon.

L’église avec son clocher flotta sur l’eau quelques instants, comme une arche de Noé. Puis elle se mit à s’enfoncer et, tout à coup, coula à pic.

Machinalement, les yeux de Raoul se reportèrent sur ce qui avait été la maison du capitaine Lynch. Plus rien n’en subsistait.