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Page:London - Contes des mers du Sud, trad. Postif et Gruyer, 1948.djvu/227

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mètres, puis fit dans l’eau un plouf ! énorme. Les yeux dilatés de Raoul se persuadèrent qu’ils avaient vu le vieux capitaine lui envoyer, de la main, un signe d’ultime adieu.

Tous les Noirs se hâtaient de descendre des arbres et Raoul décida de les imiter.

Il toucha l’épaule de l’homme, son voisin, et lui fit comprendre qu’il agirait prudemment en suivant son exemple.

Mais l’homme lui désigna les deux femmes, paralysées par l’épouvante et qui prétendaient ne pas bouger, non plus que la fillette, qui tenait toujours son chat.

Alors il descendit seul et, sous les torrents d’eau de la pluie du ciel et des vagues, il se ligota solidement au tronc brisé d’un cocotier qui, déchargé de sa tête, avait chance de tenir bon.

C’est ainsi qu’il passa la nuit. Il lui semblait que la fin du monde était arrivée et que l’univers allait s’engloutir dans le chaos.

Vers le point du jour, Raoul était encore là. Et voici ce qu’il vit.

Le pandanus auquel, non loin de lui, en compagnie de sa mère, de sa femme et de sa fille, était accroché Mapouhi fut, en dépit de ses puissantes racines, arraché du sol et emporté dans le lagon.

Celui-ci était devenu une sorte de mortier, où l’eau furieuse brassait, écrasait et entrechoquait pêle-mêle arbres brisés, poutres et épaves, survivants et cadavres.

Mais l’épine dorsale de la tornade n’allait pas tarder à se rompre.