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Page:London - Contes des mers du Sud, trad. Postif et Gruyer, 1948.djvu/231

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l’ignorait pas, que Takokota. Il était inhabité et situé à vingt-cinq kilomètres au nord de Hikouérou.

Huit jours durant, Naouri se sustenta avec les huit cocos qui l’avaient soutenue sur l’eau et qui lui fournirent, chichement, nourriture et boisson. Mais il était fort problématique que quelqu’un vînt à son secours.

Elle aperçut la fumée de plusieurs vapeurs qui, de Tahiti, se rendaient à Hikouérou. Aucun d’eux ne s’avisa de faire un crochet jusqu’à elle.

Seuls, de nombreux cadavres, que projetait la mer à l’heure du flux, lui vinrent rendre visite.

Chaque matin, ils festonnaient la grève d’une horreur funèbre. Leur puanteur l’incommodait fort et, tant qu’elle en eut la force, elle les rejetait à l’eau, où les requins, à qui ils avaient échappé, les dévoraient.

Quand sa faiblesse fut devenue trop grande, elle se contenta de s’en écarter. Mais pas bien loin, étant donné l’exiguïté de l’îlot.

Après avoir consommé son dernier coco, elle s’efforça d’en découvrir d’autres. Mais pas de cocos. Rien que des cadavres.

Elle se coucha sur le sable, anéantie. C’était la fin. Il ne lui restait plus qu’à attendre la mort.

La vie, pourtant, était tenace chez la vieille femme.

Au sortir d’une de ses prostrations, elle vit devant elle un corps humain flotter que le flot lui lança : c’était celui d’un homme blanc à la tête garnie d’une chevelure rousse.