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Page:London - Contes des mers du Sud, trad. Postif et Gruyer, 1948.djvu/74

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m’avait élevé, je le ferais souffrir, souffrir profondément,.

Et cette seule considération suffisait pour que penchât autrement la balance.

Nous avons, pendant dix-sept ans, vécu l’un près de l’autre. Dix-sept ans durant, il m’a veillé dans mon sommeil, m’a soigné dans la fièvre ou si j’étais blessé, et, pour que je ne fusse pas blessé, il m’a ; fait souvent un rempart de son corps.

Nous avons, sur le Pacifique, navigué de compagnie depuis Hawaï jusqu’à Sydney, et du détroit de Torrès dans la mer des Indes jusqu’aux îles Galapagos, qui dépendent de la République de l’Equateur.

Trois fois, nous avons fait naufrage. En Polynésie, parmi l’archipel madréporique des îles Gilbert, puis sur les côtes de la Nouvelle-Irlande ; puis aux îles Fidji.

Partout où il y avait un dollar à gagner, nous avons pratiqué le trafic de la nacre et des perles, du coprah, du bêche-de-mer[1], de l’écaille, et renfloué-ou exploré les épaves des navires naufragés.

À Papeete, je me souviens, existait un club où se réunissaient tous les trafiquants, tous les capitaines et tous les coureurs d’aventures des mers du Sud,

On jouait et buvait ferme et j’avoue, à ma honte, que j’agissais comme les autres. Bien souvent, je

  1. Le bêche-de-mer est un poisson comestible qui se trouve dans les eaux du Pacifique et fait l’objet d’un commerce assez important.