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Page:London - Le Cabaret de la dernière chance, 1974.djvu/149

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Alors, pour ce qui concerne John Barleycorn, commença pour moi une période d’innocence. D’un bout du mois à l’autre, je ne savais plus ce que c’était de prendre un verre. À peine âgé de dix-huit ans, plein de santé et possédant des muscles endurcis par le travail mais indemnes, j’avais besoin, comme tout jeune animal, de diversions, de mouvement, de ce quelque chose que ne procurent ni les livres ni le travail mécanique.

Je m’aventurai à l’Y. M. C. À.[1] où je trouvai une vie saine et athlétique, mais trop juvénile. J’y venais trop tard. J’étais bien plus vieux que mon âge. Ayant frayé avec beaucoup d’hommes, je connaissais des choses mystérieuses et violentes. J’avais vécu une vie tout à fait opposée à celle des jeunes gens que je rencontrais à l’Y. M. C. À. Je parlais une autre langue, je possédais une philosophie plus sombre et plus terrible. Quand je fouille ces souvenirs je me rends compte que je n’ai jamais eu d’enfance.

Les garçons de l’Y. M. C. À. étaient trop jeunes et trop innocents pour moi. Je ne me serais pas arrêté à ce détail s’ils avaient pu me comprendre et me prêter leur aide intellectuelle. Mais j’avais tiré des livres plus de leçons qu’eux. La pauvreté de leur expérience physique et intellectuelle donnait un résultat si négatif qu’il contrebalançait leur austérité morale et leurs sports hygiéniques.

En un mot, je ne pouvais m’intéresser à de simples jeux d’écoliers. Cette vie d’enfants, propre et splendide, m’était refusée parce que

  1. Association chrétienne de jeunes Gens.