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Page:London - Le Cabaret de la dernière chance, 1974.djvu/181

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dans la misère. Quand j’avais besoin d’argent, je ne pouvais frapper qu’à deux portes : celle d’un coiffeur ou d’un bistrot. Le coiffeur exigeait cinq pour cent par mois, payables d’avance. C’est-à-dire que si je lui empruntais cent dollars, il m’en remettait quatre-vingt-quinze. Les autres cinq dollars, il les retenait comme intérêts pour le premier mois. Le second mois je lui versais cinq nouveaux dollars, et je continuais de la sorte en attendant un coup de chance avec les éditeurs qui me permettait de liquider ma dette.

Le bar était l’autre endroit où je pouvais m’adresser en cas de détresse. Ce patron, je le connaissais de vue depuis deux ans. Je n’avais jamais consommé chez lui, et lorsqu’il m’arrivait de recourir à ses services, je ne dépensais pas un cent. Pourtant, il ne me refusa jamais de l’argent. Malheureusement il quitta notre ville avant que je n’atteigne la prospérité. Aujourd’hui encore, je regrette qu’il ne soit plus là. Ces sentiments me sont dictés par le code que j’ai appris. La seule chose à faire, et que j’exécuterais à l’instant même si je savais où habite cet homme, serait d’entrer de temps à autre dans son bar pour dépenser quelques dollars au comptoir, en reconnaissance des anciens services rendus.

Ce que je viens de dire a moins pour but d’exalter les mérites des patrons de bistrots que la puissance de John Barleycorn, et de montrer une fois de plus les voies innombrables qui vous amènent dans ses bras jusqu’à ce qu’enfin on ne puisse plus se passer de lui.

Mais je reprends le fil de mon histoire. Loin de la route aventureuse, plongé jusqu’au cou dans l’étude, j’étais occupé tout le jour et