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Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/110

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LE LOUP DES MERS

se ressaisir. Une lueur de lucidité reparut dans ses yeux, et il relâcha son étreinte, avec un petit rire qui était plutôt un grognement.

Mes muscles se refusèrent à jouer et, incapable de me redresser, je roulai sur le sol, où je demeurai prostré pendant que Loup Larsen s’asseyait tranquillement sur une chaise, allumait un cigare et me guettait.

Tout en me tordant sur le plancher, j’apercevais, dans les yeux incisifs de Loup Larsen, cette curiosité amusée que j’avais si souvent remarquée et dont, pour l’instant, je me serais fort bien passé. Il scrutait froidement ma souffrance.

Je parvins enfin à me remettre sur mes pieds et montai l’escalier. Les jours heureux étaient terminés et je n’avais plus qu’à rejoindre la cuisine.

Mon bras gauche était engourdi et comme paralysé. Il me fut impossible de m’en servir pendant plusieurs jours, et il demeura raide durant des semaines. Encore Loup Larsen n’avait-il exercé, sur mon biceps, qu’une pression modérée, si l’on peut dire. Je m’en rendis compte le lendemain.

Je le vis, en effet, passer la tête dans la porte de la cuisine et, en signe de réconciliation, il me demanda comment se portait mon bras.

— Pas trop bien… répondis-je tristement.

— Ça aurait pu être pire ! fit-il en souriant.

À ce moment, j’étais occupé à éplucher des

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