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Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/156

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LE LOUP DES MERS

Mugridge n’avait pas fini de parler que l’ancien mousse était sur lui et le terrassait. Par trois fois il se releva et tenta de regagner sa cuisine. Trois fois il fut renversé.

— Oh ! mon Dieu ! hurlait-il. Au secours ! Au secours ! Faites quelque chose !

Mais tout le monde riait aux éclats. C’était un soulagement général. La tragédie était terminée et la farce commençait.

Chasseurs et matelots se bousculaient, afin de mieux voir la raclée qui tombait sur le coq détesté. Moi-même, je me sentais infiniment joyeux. Oui, je l’avoue à ma honte, le traitement que Leach administrait à Thomas Mugridge — presque aussi terrible que celui que les mouchardages de Mugridge avaient valu à Johnson — me remplissait d’allégresse.

Seule, l’expression du visage de Loup Larsen ne s’était pas modifiée. Il avait gardé sa même posture et continuait à observer, avec son calme imperturbable. Il était pareil au chimiste qui suit, avec attention, dans une cornue qui bout, le processus de l’expérience qu’il a mise en train. Qui sait si un mystère étonnant n’en sortira pas éclairci ?

Tout continuait à se passer comme tout à l’heure dans la cabine. Thomas Mugridge cherchait inutilement à fuir et à se réfugier, en rampant, dans sa cuisine ou dans un autre trou et tentait sans succès de se protéger contre la pluie des coups, qui s’abattaient sur lui avec une surprenante rapidité.

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