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Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/212

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LE LOUP DES MERS

immense, avec la menace redoutable de ces sombres nuages suspendus sur eux.

Lorsque Loup Larsen fut de retour sur le pont, je remarquai un frémissement de ses narines et, dans ses yeux, qui avaient pris leur teinte bleu clair, une étrange clarté qui brillait.

Ses traits s’étaient durcis. Mais une joie visible s’y lisait. Et tout à coup il a éclaté de rire, d’un rire sonore, d’un rire de mépris à l’adresse de la tempête qui approchait.

Je le vois encore, debout, tel un nain sorti des contes des Mille et Une Nuits et dressé devant un immense et malfaisant Génie qu’il défie. Loup Larsen, chétive créature devant le cataclysme imminent, bravait le Destin. Il était sans peur.

Il marcha vers la cuisine et cria par la porte :

— Dis donc, cuistot ! Quand tu en auras fini avec tes casseroles et tes marmites, tu viendras nous rejoindre. On aura besoin de toi ! Tiens-toi prêt au premier appel…

« Franchement, Hump, ne trouvez-vous pas que la partie que nous allons jouer est plus affriolante qu’un verre de whisky ? Votre Omar Khayyam n’a pas connu de pareilles sensations, j’en suis sûr. Il a, en partie, raté sa vie !

À deux heures de l’après-midi, le ciel à l’ouest s’était obscurci à son tour. Le soleil s’était voilé, puis éteint.

Un crépuscule fantomatique, où fusaient seules des lueurs errantes, de couleur pourpre, était descendu

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