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Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/248

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LE LOUP DES MERS

l’arrière, mais il regagna peu à peu sur nous. Tout le monde, à bord, braqua ses yeux vers lui, et Loup Larsen comme les autres.

La petite embarcation bondissait sur les lames, ou plongeait au creux des vagues, dans le même rythme inlassable ; elle piquait dans les abîmes ou s’élançait vers le ciel. Il semblait impossible qu’elle pût continuer longtemps. Mais cet impossible, elle l’accomplissait.

Un grain passa et la pluie nous voila le canot. Quand elle cessa, emportée par le vent, il était à vingt mètres de nous.

— La barre au vent, toute ! hurla Loup Larsen, en se précipitant lui-même vers la roue, qu’il prit des mains du Canaque et qu’il fit tourbillonner.

Une fois de plus, les voiles se gonflèrent et, vent arrière, le Fantôme reprit sa course.

La poursuite désespérée recommença, elle aussi. Elle dura pendant deux heures encore. Le même manège se renouvelait sans arrêt. Nous ralentissions et mettions en panne. Puis nous repartions, pour ralentir, remettre en panne, et repartir.

Et toujours le petit bout de voile luttait, alternativement jeté vers le ciel pour retomber dans les vallées liquides.

Un grain plus violent que le précédent le cacha à notre vue, tandis qu’il se trouvait à un quart de mille en arrière.

Il ne reparut jamais.

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