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Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/341

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JACK LONDON

Et notre déjeuner frugal fut arrosé d’une simple tasse d’eau froide.

Après quoi la jeune femme exigea que, sans tarder, je lui apprenne à gouverner. C’était un disciple plein d’attention et de bonne volonté. En peu de temps, elle sut faire filer droit le canot, lofer aux risées et, en cas de besoin, donner de la corde à la voile ou en reprendre.

— Et maintenant, monsieur Van Weyden, me dit-elle en me montrant les couvertures étendues au fond du canot, au lit !

Pouvais-je refuser ? J’étais terriblement harassé. Et Maud insistait :

— Et vous dormirez jusqu’au déjeuner…

J’obéis donc et ce fut avec volupté que je me glissai dans la couche que la jeune femme m’avait préparée de ses propres mains.

Quelque chose d’elle était demeuré dans les couvertures où elle avait dormi, et je me laissai aller à une douce et inconsciente rêverie.

Ce fut en me réveillant et en voyant se détacher devant moi, alternativement sur le gris lointain du ciel et sur celui, plus proche, des flots, un charmant visage ovale, emmitouflé dans une casquette à rabats, que je m’aperçus que j’avais dormi.

Je regardai ma montre. J’avais dormi sept heures durant. Pendant sept heures, Maud avait gouverné.

J’allai vers elle. Elle était complètement ankylosée, et il me fallut lui ouvrir sa main, crispée sur la barre. Elle avait épuisé toute sa force et

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