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Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/352

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LE LOUP DES MERS

se renouvelait sans cesse, tantôt toute flamme, tantôt toute rosée ou toute brume. Elle était à la fois timide et craintive, et d’une indomptable énergie.

Elle acceptait sans protester, et comme une chose toute naturelle, de gîter sur cette étroite embarcation, de subir la tempête, l’horrible mal de mer et notre isolement du monde. Toujours, chez elle, l’esprit dominait la chair, et la sérénité de sa belle âme transparaissait dans son regard.

L’univers se mouvait autour d’elle, et toujours, sous des formes diverses, elle demeurait elle-même.

Et sans cesse nous étions rejetés vers le nord-est, loin, plus loin du monde civilisé.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Ce fut un après-midi où le vent faisait rage sur notre canot, avec ses soufflets titanesques.

Las de cette lutte ininterrompue contre les éléments déchaînés, je levai machinalement la tête vers le ciel, en une muette supplication aux Puissances Supérieures afin qu’elles cessent de nous écraser, Maud et moi, et nous accordent le salut.

Puis j’abaissai mon regard.

Était-ce une illusion de mes yeux, brûlés par tant de jours et tant de nuits d’insomnie ? Voilà ce que je me demandai tout d’abord.

Je reportai vers Maud mes prunelles, comme pour m’assurer de ma propre existence, dans le temps et dans l’espace. Ses joues ruisselantes

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