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Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/407

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JACK LONDON

une couchette, qui nous donnait, avec son étroit matelas de bourre de laine, l’impression du lit le plus somptueux qui se pût rêver.

Instinctivement, Maud se regarda dans une petite glace qui était pendue au mur de sa cabine.

Elle eut aussitôt un recul effrayé et s’exclama, avec un grand cri :

— Miséricorde ! (Puis elle éclata de rire.) Que penseraient nos amis, s’ils pouvaient nous voir en ce moment ? Nous n’avons jamais fait très attention à notre aspect extérieur. Bien franchement, Humphrey, à quoi trouvez-vous que je ressemble ?

— À un épouvantail à moineaux ! répondis-je en riant à mon tour. Votre corsage et votre jupe sont ornés de multiples accrocs, et disparaissent sous la boue et sous les taches de graisse.

« Inutile d’être Sherlock Holmes, pour en déduire que vous avez cuisiné sur un feu de campement et que vous avez passé de longues heures à extraire de l’huile de phoque. Et pour couronner le tout, ce béret ! Oui, voilà où en est la poétesse qui a écrit Baiser toléré !

Avec une révérence cérémonieuse, Maud riposta du tac au tac :

— Et vous, si vous pouviez vous voir…

Nous plaisantâmes de la sorte, pendant cinq minutes, avec une franche gaieté, où perçait pourtant une note sérieuse et émue.

C’était un lien de plus qui resserrait nos vies, et la lumière tremblante de nos yeux disait claire-

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