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Page:Londres - L’Âme qui vibre, 1908.djvu/87

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EN ERRANT

III

Amis, pardonnez-moi si je vous laisse en route.
Vous allez me comprendre (et m’applaudir sans doute) :
Je viens de déchirer la fin de ce morceau.
Paraître inconséquent vaut mieux que d’être sot.
Et, sot, je l’eusse été, si, me vainquant moi-même,
Je n’avais fait un sort au reste du poème.
Car, à force d’errer de la brume au matin,
J’en étais arrivé par me perdre en chemin.
Or, n’ayant pu donner suite à mon aventure,
J’avais imaginé de peindre la nature.
On voyait, dans mes vers, se croiser tour à tour
Le berger conduisant, dès la pointe du jour,
Son troupeau moutonnant vers les plaines fleuries
Et la bergère fraîche aux lèvres dégourdies.
L’oiseau chantait ; et je n’avais par ce matin
Pas omis les ruisseaux au murmure argentin.
Mais, surtout, (et, je crois, la surprise était bonne),
L’on pouvait — sur l’honneur — me surprendre en personne,