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Il était à peu près sept heures du matin, de gros nuages gris noirâtre dérobaient à nos yeux toute l’étendue du ciel, un jour sombre nous éclairait à peine ; les vents déchaînés de la partie du sud-est luttaient avec effort contre les flots ; le perfide élément, jusque dans ses abîmes, horriblement agité, offrait de tous côtés l’épouvantable image de la mort. Tantôt le navire, avec une rapidité extrême, semblait glisser sur la pente des vagues, et nous nous trouvions tout à coup comme ensevelis dans le creux d’un profond vallon, environnés de montagnes énormes, dont les sommets, se touchant pour ainsi dire, semblaient sonner notre dernière heure ; et tantôt, au contraire, élevés sur le dos des flots pleins d’écume, nos tristes regards ne tombaient que sur des précipices sans fond.

Un des passagers, qui comme moi était resté sur le pont pour voir cette belle horreur, avait trouvé bon de s’attacher avec une corde à l’un des mâts ; moi, je trouvai plus de sûreté à me cramponner aux sabords.

Que de pensées sublimes cette scène d’horreurs présentait en foule à l’esprit ! quel homme, sans une émotion profonde, pourrait en soutenir la vue ? C’est alors que les passions se taisent, que la rai-