Page:Longin - Voyage a la Guadeloupe, 1848.djvu/19

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 11 —

le contour se dessinait sur un ciel sans nuages et semé des plus brillantes étoiles. On voyait briller çà et là, à des hauteurs différentes, mille petites lumières qui éclairaient autant d’habitations, mais sans distinguer autre chose. La mer était calme, un léger zéphir enflait doucement les voiles. Nous ne faisions que petite route et nous ne pûmes aborder que le lendemain.

Qui pourrait se peindre, sans l’avoir éprouvé, le sentiment de bonheur dont on se sent rempli quand, pendant plus d’un mois, suspendu sur l’abîme, n’ayant sans cesse sous les yeux que le ciel et l’eau, exposé à mille dangers divers, on vient à apercevoir tout à coup la terre, objet de ses désirs ? Non, je n’oublierai jamais la vive et profonde impression que j’éprouvai à cette époque de ma vie ! Je me proposai de passer le reste de la nuit sur le pont pour contempler, à loisir, ce beau spectacle. Mais bientôt les lumières s’éteignirent, et le sombre prospectus de l’île resta tout seul devant mes yeux. Heureux habitants d’une terre étrangère, vous allez, me disais-je, vous livrer au repos ; vous allez, au sein d’un paisible sommeil et sous un toit protecteur, réparer les fatigues du jour, certains de vous retrouver encore sur un terrain solide, quand l’aurore prochaine viendra ouvrir vos paupières et