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que les cris de tout l’équipage se firent entendre. Ma frayeur fut extrême ; je crus que nous nous brisions sur un rocher. Je ne fis qu’un saut et je fus sur le pont, tant il est vrai que la peur donne des ailes. Mes alarmes disparurent lorsque je connus la cause et de la secousse et des cris. Une petite goëlette louvoyait en sens contraire et s’avançait sur notre ligne. Le capitaine lui avait fait signe de dévier, et, soit qu’elle n’eût point compris, soit qu’elle n’ait pas voulu, elle continua sa route. Notre navire pouvait la couler bas ; mais le capitaine, extrêmement prudent, quitta la ligne ; et comme on était presque au contact, le beaupré de la goëlette s’engagea dans les sabords du navire et fit des dégâts sur le pont ; entièrement rassuré, je redescendis pour achever de me raser et faire un peu de toilette.

Nous approchions de l’endroit où l’on allait mouiller ; des nègres et des négresses vinrent alors en foule, dans leurs pirogues légères, nous offrir des provisions. Les uns apportaient des légumes, les autres du poisson ; d’autres, enfin, des fruits de toute sorte, parmi lesquels se distinguaient la figue banane et la douce orange. Le directeur de la poste vint à son tour chercher le paquet de lettres et nous apprit que la fièvre jaune faisait des ravages affreux dans la colonie ; triste nouvelle pour nous,