Page:Longin - Voyage a la Guadeloupe, 1848.djvu/62

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 54 —

laisse vivre jusqu’à seize ou dix-huit ans sans leur donner ou leur faire donner la moindre notion sur ce qu’ils doivent à leur créateur, à leurs semblables, à eux-mêmes ; et c’est lorsque les passions, portées à leur maximun d’effervescence, exercent sur eux un empire absolu, c’est lorsque l’amour brûle leur cœur d’une flamme souvent impure, qu’on leur parle pour la première fois de morale et de religion. Et pourquoi ? parce que c’est à cette époque qu’on pense à les engager dans les liens du mariage. On dispose tout à cet égard, puis on se rappelle qu’il est une cérémonie consacrée par un antique usage et qui doit précéder ; une cérémonie sine quâ non, la première communion ; alors, on les fait inscrire à l’église ; trois mois avant la cérémonie commencent les instructions, et c’est dans cet intervalle qu’il faut leur apprendre les principes et les devoirs sacrés de la religion ; c’est dans trois mois qu’il faut développer, échauffer et faire croître le germe précieux et délicat de la vertu dans des cœurs agités par mille passions et que l’amour entraîne ; aussi, qu’arrive-t-il ? chacun le devine aisément ; cette dévotion de circonstance n’étant qu’un édifice construit sur le sable, s’écroule promptement ; les leçons qu’on a reçues s’oublient, on reprend son train de vie accoutumé, et on finit sa carrière comme on l’avait commencée.