et de Laure[1] : si je voyais un malheureux jeune homme escalader mon balcon au péril de ses jours, ou traverser un détroit à la nage comme Léandre, ou se percer le sein de son épée comme Pyrame, — et que Phénice ne trouvât pas là son intérêt, tout cela ne serait pour elle qu’un sujet de moquerie et de risée.
L’avez-vous entendue ?
Que trop. — Écoutez, Phénice.
Parlez.
S’il y avait un homme qui fût éperdument épris de vous et qui vous fît des présents, auriez-vous de l’amour pour lui ?
Alors — oui.
Que vous faudrait-il pour vous prouver cet amour ?
Vous êtes bien borné et bien maladroit. Voulez-vous que je m’explique mieux ?
Oui, de grâce.
Écoutez-moi donc. — Celui qui a un jardin, que fait-il ? Il cultive, il arrose assidûment l’arbre qu’il y a planté, afin d’en cueillir plus tard les fruits savoureux… Si vous ne comprenez pas cet apologue, en voici un autre. Celui qui a un beau cheval, que fait-il ? Il le tient soigneusement dans une bonne écurie, il veille à ce que rien ne lui manque ; il assiste à ses repas ; il est présent quand on le ferre ; il est attentif à ce que le mors ou le frein ne lui blessent pas la bouche ; il le fait friser, orner, couvrir de bandelettes ; il le caparaçonne de la façon la plus galante ; il paye des domestiques vigilants qui le servent : — et tout cela pour le monter de temps à autre… M’avez-vous comprise à cette heure ?
Il me semble en effet que je vous comprends.
Eh bien ! qu’attendez-vous, puisque vous connaissez mon désir ?
As-tu payé les inspecteurs ?
- ↑ Allusion à la maîtresse de Dante et à celle de Pétrarque.