Page:Lope de Vega - Théâtre traduction Damas-Hinard tome 2.djvu/345

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Don Juan.

Je sais les devoirs qu’imposent l’amitié et la reconnaissance. Laissez-moi faire… et puis vous verrez qui je suis. Adieu.

Don Louis.

Je pourrai, n’est-ce pas, par votre entremise, la voir tous les jours ?

Don Juan.

Je suis à vos ordres.

Don Louis.

Avertissez-la donc que j’irai chez elle sous prétexte de vous voir.

Don Juan.

Je suis, comme auparavant, votre prisonnier.

Don Louis.

Je vous quitte plein de confiance en vous. (À part.) Ô mon cœur ! réjouis-toi ; ouvre-toi de nouveau à l’espérance !

Il sort.
Don Juan.

Hélas ! mon bonheur a bientôt passé. Il avait commencé d’une façon trop glorieuse.


Entre CITRON.
Citron.

À quoi pensez-vous ?

Don Juan.

Je suis rendu.

Citron.

Que voulez-vous dire ?

Don Juan.

Et je laisse tout. — N’as-tu point vu quelquefois de noirs nuages voiler tout à coup le plus brillant soleil ? n’as-tu pas entendu parler de navires déplorablement échoués au moment où ils touchaient le port ? N’as-tu pas ouï conter que souvent l’orage avait ravagé un champ, alors que le laboureur regardait avec orgueil la moisson prochaine ?… Ah ! décevante espérance !… ah ! fol amour !… je suis au milieu de la faveur et je pleure l’absence.

Citron.

De quelle absence parlez-vous ?

Don Juan.

Je pars.

Citron.

Que voulez-vous dire ?

Don Juan.

Il le faut, nous allons à Madrid.

Citron.

À Madrid ?

Don Juan.

Comment veux-tu que je serve les intérêts de don Louis auprès