Page:Lorain - Tableau de l’instruction primaire en France.djvu/207

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puisque je l’ai observée dans quelques lieux. C’est l’influence qu’exercent dans les campagnes certaines personnes distinguées par leur nom et par leur fortune. Ces personnes prétendent qu’il est inutile d’enseigner à lire ou à écrire à des paysans qui doivent gagner leur pain à la sueur de leur front. Comme si ces hommes ne devaient pas puiser dans l’instruction plus d’industrie, plus d’activité, et comme une nouvelle vie, qui tournerait ensuite à leur propre bonheur et à l’avantage de la société.

Gers ; arr. de Condom, cant. de N..... — Certaines communes du sud mettent obstacle aux progrès de l’instruction. Dans les unes, les conseils municipaux, forts de la faiblesse des maires, refusent les fonds. Nous ne voulons pas, disent-ils, instruire les enfants pauvres, parce que la culture de nos terres serait abandonnée ; les enfants pauvres prendraient des métiers qui les leur feraient abandonner.

Gironde ; cant. de C...... — Les propriétaires aisés disent qu’ils se garderont bien de faire instruire les enfants indigents de leur commune ; s’il en était ainsi, ajoutent-ils, ils ne trouveraient personne pour faire cultiver leurs terres.

Charente ; arr. d’Angoulême, cant. de Larochefoucaut, comm de S… C.... — Il n’y a, dans cette commune, que trois ou quatre propriétaires ; leur intérêt est que les colons ne fassent pas instruire leurs enfants, parce que ce serait autant de bras de moins pour l’agriculture.

Corrèze ; arr. de Tulle. — Le petit séminaire de S...... a attiré une multitude de jeunes gens ; ils y sont restés jusqu’à quinze ou dix-huit ans ; un dixième, au plus, est entré au grand séminaire ; les neuf dixièmes qui ont abandonné la carrière ecclésiastique, sont revenus dans leur famille ; très-peu ont voulu se livrer aux travaux des champs ; à charge à leurs parents, ils ont été montrés au doigt comme paresseux. Tous les paysans craignant pareil avenir pour leurs enfants, ne veulent plus d’instruction, et n’envoient leurs enfants à l’école que le moins qu’ils peuvent.

Dordogne ; arr. de Riberac, cant. de Verteillac. — Les habitants d’une classe plus élevée ne sont pas, en général, favorables à l’extension des études primaires, persuadés que le paysan qui dépasse un certain degré de connaissances, se dégoûte du travail et devient un personnage inutile.

Drôme ; arr. de Nyons, cant. de Buis. — Il y a dans tout ce canton une extrême négligence, presque de l’aversion pour l’instruction primaire. Les familles riches sont loin de l’encourager, et témoignent hautement qu’elles craignent de voir l’instruction se répandre dans les pauvres.