Page:Lorain - Tableau de l’instruction primaire en France.djvu/218

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foyers pour aller mendier ou gagner du pain dans des climats plus tempérés.

Charente-Inférieure ; arr. de Marennes, comm. de Saint-Agnan. — Cette commune est réputée très-malsaine, et les maladies qu’y ont contractées plusieurs maîtres, ont ensuite détourné certains autres de s’y fixer.

Bordogne ; arr. de Riberac, cant. de Mussidan. — La Double, à laquelle nous croyons devoir un article spécial, s’étend sur un espace de vingt-huit lieues carrées, partagé entre cinq cantons. Presque toute cette surface n’offre à l’œil que des bois, des ajoncs et des bruyères. Dans ces forêts et dans ces landes immenses, on trouve à peine, de loin en loin, de chétives cabanes ou de misérables hameaux, si, des communes, répandues dans ces tristes solitudes, on excepte Saint-Vincent qui, tout sombre qu’il est, se détache comme un oasis au milieu du désert. Depuis quinze ans, les habitants de la Double font les plus grands efforts pour améliorer leur position : ils sont plus actifs, plus laborieux. Avant la famine de 1817, peu soucieux de l’avenir, accoutumés à la pauvreté, ils se croyaient trop heureux quand ils étaient en avance d’un jour. On voyait arriver dans les villes ces hommes maigres et de petite taille, accompagnés de modestes bêtes de somme, dont la charge devait acquitter les dettes de la veille et payer les provisions du lendemain. Le besoin éveilla leur industrie ; ils se mirent à défricher le terrain qui leur parut le moins ingrat, et, depuis lors, ils ont accru leurs ressources ; mais, comme ils ignorent ces procédés ingénieux qui viennent si heureusement au secours de la nature, la terre, qu’ils ont arrosée de sueurs, est entièrement épuisée dès la seconde ou la troisième année de l’exploitation.

Haute-Garonne ; arr. de Saint-Gaudens, cant. de Saint-Béat. — On aime l’instruction, on en a besoin, mais on la conçoit peu ; on n’étudie que pour devenir prêtre, et là, il faut du latin, rien que du latin ; on se consolerait, à ce prix, de ne pas savoir un mot d’orthographe. Tout ce qui ne doit pas être prêtre, émigre dès le bas âge pour aller vendre des almanachs à Paris. Ceux-là ont besoin d’une bonne et morale instruction, mais ils croient avoir tout fait quand ils savent lire et compter ; la plupart reviennent au pays sans avoir beaucoup gagné sous le rapport moral.

Gironde ; arr. de Blaye, cant. de Blaye et Saint-Ciers-la-Lande. — Je dois signaler aussi comme cause du peu de développement de l’instruction primaire, un usage qui s’est établi dans l’arrondissement de Blaye : des individus, qui savent un peu lire et écrire, réunissent, pendant les soirées d’hiver, des enfants du voisinage, leur transmettent les mauvais principes de lecture et d’écriture qu’ils ont eux-mêmes, et reçoivent une rétribution qui se paie le plus souvent par une journée de travail ; de cette manière, l’instituteur breveté se voit enlever des élèves sur lesquels il devait compter, et ces élèves reçoivent la plus détestable instruction.