Page:Lorrain, Jean - Sonyeuse, 1891.djvu/17

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être un peu trop allongé, mais d’une exquise finesse, étonnait le regard par le laiteux et le satiné de sa peau ; c’était de la neige dans toute son éclatante transparence et jamais depuis je n’ai rencontré de chair de femme aussi lumineusement blanche, on eût dit de l’aurore infusée sous ses tempes : toute enveloppée qu’elle fût de voiles de gaze jaune, bouillonnant au-dessus d’un grand chapeau de paille à la mode d’alors, à travers cette brume dorée, son teint de blonde éblouissait, mais ce qui achevait de déconcerter dans ce radieux visage et vous poignait en même temps le cœur, c’étaient les yeux, les yeux aux prunelles bleu sombre, deux saphirs presque noirs largement ouverts entre les paupières meurtries, deux regards douloureux, comme baignés de larmes et frappés cependant de je ne sais quelle stupeur.

Oh ! l’effarement de ces yeux égarés et charmants dans leur supplication muette, j’y ai songé depuis bien souvent et j’ai toujours gardé en moi la conviction que la femme, qui portait de tels yeux, devait être sous l’influence d’un narcotique ou de quelque puissance mystérieuse !