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Page:Loti - Jérusalem, 1895.djvu/39

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oliviers, les petits murs ont disparu ; plus que des broussailles et des pierres, avec çà et là des asphodèles, des semis d’anémones rouges ou de cyclamens roses. Le ciel s’est voilé d’un brouillard gris perle, d’abord très ténu, très diaphane, mais qui tend à s’épaissir, et la lumière baisse. L’heure de croiser les quelques touristes, qui font Hébron aujourd’hui, est passée, et nous ne rencontrons plus que des files de lents chameaux, ou des groupes d’Arabes à cheval, beaux et graves, échangeant le salam avec nous.

La lumière baisse toujours, sous ce brouillard épaissi, qui n’est ni un nuage, ni une brume ordinaire, ni une fumée ; mais quelque chose de très particulier, comme l’enveloppement des visions douces.

De loin en loin, quelque grande ruine, mutilée, incompréhensible, debout et haute, regarde au loin l’abandon morne de cette Judée qui jadis fut le point de mire des nations.

Maintenant, plus rien que des pierres, les dernières broussailles ont disparu ; un sol tout de pierres, sur lequel de grands blocs détachés gisent ou s’élèvent. Et, dans ce pays si vieux, à peine distingue-t-on les vrais rochers des débris de constructions humaines, restes d’églises ou de forteresses,